Entre deux clans [Elsa - Julia - Nick]

Plus matinale qu'à son habitude, Elsa était debout à six heures tapantes. Elle avait vite renoncé à retourner dormir en voyant le premier rayon de soleil de cette journée qui promettait d'être remplie de lumière. Depuis le début des vacances et même un peu avant, New-York n'était plus sous les flots, mais brillait sous un soleil terriblement agréable. Il était rare que la grande métropole soit sous le soleil ainsi, et donc beaucoup de personnes ne se plaignaient en rien de ce soudain éclairement. Et Ellie aimait particulièrement le soleil de New-York, peut-être parce-que trop habituée à la pluie de la grande ville. En attendant, elle-même ne comprenait toujours pas comment elle faisait pour se lever si tôt, après être resté assoupie sous les étoiles jusqu'à un peu plus de minuit. Elle se trouvait particulièrement bizarre. Bizarre parce que les nombreux jours où elle se couchait tard, elle arrivait à être debout de bonne heure et parce que les rares jours où elle se couchait tôt, elle était en retard pour son premier cours de la journée d'une vingtaine de minutes.
Elsa avait donc renoncer à son lit douillet pour aller camper silencieusement dans la salle de bain, le temps que ces deux colocataires se réveillent, ne voulant les réveiller. En quinze minutes, mademoiselle Kane était lavée, habillée d'une mini-jupe et d'un tee-shirt simple noir, coiffée d'un simple serre-tête, et maquillée d'une touche de mascara et d'eye-liner. Il fallait dire que la jeune femme n'aimait pas vraiment le maquillage, et se contentait de peu. Malgré tout, elle savait qu'arrivée ainsi au lycée, Queen S lui passerait un savon avant de lui jeter sa trousse dite « de secours » pour qu'elle se remaquille dans les toilettes. Et alors, elle ressortirait, les joues peinturlurées d'un bronzage visiblement superficiel, d'yeux presque invisibles sous une couche épaisse de crayon noir, et de lèvres remplies de gloss à la cerise immonde fait avec de la graisse de baleine. Elle repassa un coup de peigne à sa chevelure parfaite, relu tranquillement tous ses cours, qu'elle connaissait déjà par cœur, et fila avec son sac pesant une tonne, avant de tomber sur ses colocs'. Celles-ci étaient vraiment gentilles, et très agréables à vivre, mais disons qu'Elsa n'était pas du matin.

Quand elle arriva lycée, Ellie ne se trompa pas. Queen S lui tomba dessus dès les dortoirs quittés, et comme promit, notre brunette passa un sale quart d'heure, avant de se retrouver perchée au-dessus du lavabo des toilettes, un crayon à la main qui dérivait un peu trop à son goût vers son œil. Elle mit dix bonnes minutes à se refaire une beauté et fila aussitôt à son casier, croisant encore une fois la grande, bien que petite au sens propre, Sara Brentwood, de qui elle était une sbire. Elsa n'aimait pas ce terme, et reprenait tout le temps ses interlocuteurs, n'importe lesquels qu'ils soient, en mimant des guillemets quand elle redisait le mot. Bien évidemment, elle ne l'avait pas choisit, ce surnom plutôt péjoratif qui résonnait chez elle comme « les petits toutous de madame ». D'ailleurs, elle n'avait pas non plus vraiment choisit ses amies. Mais elle ne s'en plaignait pas et faisait avec tous les jours. Sara ne passa pas plus de cinq minutes avec Ellie qui prétexta déposer ses affaires à son casier, ce qui en fin de compte n'était pas un prétexte, pour quitter sa soi-disant reine. Composant son code avec précipitation, elle du se reprendre trois fois avant de réussir à taper les chiffres magiques. Elle laissa lourdement tombé ses affaires, songeant qu'un cours à un élève lui plairait bien. Mais comme par hasard, la jeune surdouée n'avait personne à aider. Aucun élève n'avait de difficulté, et elle commençait même à se demander si elle ne devait pas saboter les devoirs de certains pour pouvoir enfin faire son activité préférée : aider. Activité que bien sur, elle s'appliquait de cacher. En attendant, plantée devant son casier, réfléchissant à ses cours à prendre et en même temps à un quelconque élève qui aurait besoin d'elle, miss Kane était comme qui dirait sur la lune. Elle mit du temps à se rendre compte qu'un miracle se produisait : Nick Doherty lui adressait la parole. Bien qu'elle soit populaire et tout le tralala, le nouveau, Nick, l'évitait comme la peste et ignorait complètement son statut. Et il fallait dire qu'Elsa le trouvait vachement mignon.

Blond aux yeux clairs, d'une taille et d'une musculature tout à fait dans les normes, quiconque pouvait affirmer que ce jeune Nick était un beau garçon. Malheureusement, cachée derrière cet aspect de peste en personne, la timidité d'Elsa prenait le dessus et elle n'était pas encore aller le voir. Etant sure de devenir aussi rouge qu'une tomate, la jeune femme préférait rester dans son coin et ne plus y penser. Mais là, tout de suite, maintenant, en cette matinée ensoleillée, Nick Doherty s'approchait d'elle et s'appuyait lourdement contre le casier d'à côté. Ellie releva un instant les yeux puis retourna aussitôt à ses affaires, de peur de perdre son teint normalement blanc, à ce moment bronzé, pour une couleur des plus écarlates. Elle tendit cependant l'oreille prêtant grande attention à ses paroles.
Dès lors que son camarade eut fini sa phrase, Elsa se répéta en boucle les mots exacts du jeune homme une dizaine de fois, fermant les yeux plus concentrée que jamais. Ignorant l'impatience palpable du nouveau, elle n'ouvrit les yeux qu'après avoir recouvrer totalement ses esprits. Et c'est en bafouillant une chose stupide qu'Elsa lui répondit.

« - Non... Je... D'accord. »

Réfléchissant un instant, Elsa perdit toutes couleurs, et devint visiblement plus pâle qu'à son habitude, même avec son horrible fond de teint. Elle ouvrit de gros yeux ronds qui paraissaient sûrement globuleux, mais n'y pensa pas sur le moment. Elle referma les yeux, inspirant un bon coup et priant intérieurement pour qu'il plaisante. Réalisant la phrase qui avait suivit sa demande, Ellie inspira encore plus profondément. Et puis, plus brutalement qu'elle ne l'aurait voulut, elle ouvrit les yeux et lança, toujours plus sèchement qu'elle ne l'aurait voulut.

« - Attends. Comment sais-tu que je donne des cours ? Qui te l'a dit, hein ? Personne ne doit être au courant. J'ai une idée. Si tu la ferme, je fais pareil ok ? »

Cette question ressemblait plus à une affirmation et la petite brune qui paraissait ridicule devant lui, ne le laissa pas répondre et enchaina rapidement en voyant arrivée la minuscule Julia Thompson qui était une des rares de l'établissement à être plus petite qu'Elsa elle-même. Ellie regretta la vitesse de ses paroles et son nouveau manque de réflexion après avoir lancé à son camarade qui la surplombait de cinq bons centimètres de venir la rejoindre à la cafétéria vers vingt-et-une heures, seul créneau durant lequel, le réfectoire était vide, même de personnel. La phrase eut le temps de parvenir au cerveau du spécimen masculin appuyé sur les bouts de métal que représentaient les casiers, qui hocha la tête comme pour confirmer à Elsa qu'il n'était pas si stupide et qu'il avait comprit. Aussitôt, Julia coupa les deux jeunes dans leur conversation, arrivant d'une allure provocante, qui fit derechef enragée Ellie. La petite s'arrêta à leur hauteur, un sourire narquois sur les lèvres qui s'étendait exagérément jusqu'à ses oreilles. Tremblante de rage, notre élève surdouée tenta longuement de se calmer mentalement plutôt que de faire le geste stupide de laisser sa paume de main s'écraser sur la joue, de son adversaire de toujours : Julia Thompson, sbire elle aussi au même titre qu'Elsa mais dans le camp ennemi.